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Mégane Moissonnier : de la ferme aux étoiles

  • Mégane avec ses parents...
    Mégane avec ses parents...
  • ... et avec Eddy Seguin-Maure
    ... et avec Eddy Seguin-Maure
Pas une semaine sans qu’un média de la presse équestre ne fasse sa une avec la talentueuse et supersonique Mégane Moissonnier, qui depuis deux ans connait une fulgurante ascension dans le classement mondial des meilleurs cavaliers (84e aujourd’hui), jusqu’à être régulièrement sélectionnée en équipe de France pour une coupe des nations. A moins de 25 ans, la jeune amazone étonne les spécialistes par sa très haute qualité technique, sa maturité et sa gestion du stress. Tout le monde connait maintenant son parcours, partant de ses premiers poneys en passant par l’équipe de France junior jusqu’au présent chez Laurent Guillet avec les cracks Cordial, Bracadabra et autres plus jeunes chevaux.

Mais qui connaît vraiment ses origines paysannes, son enfance au milieu des veaux et poulains, ses parents agriculteurs qui doivent, comme il se doit, consacrer tout leur temps et leur énergie à leur ferme et en même temps laisser s’épanouir ce diamant brut du saut d’obstacle ? Et, n’est-ce pas cette particularité qui fait la différence aujourd’hui ? Sa maman Christiane n’est pas loin de le penser et c’est pourquoi elle nous reçoit aujourd’hui dans leur ferme de Lent, joli village de l’Ain à 15 km de Bourg-en-Bresse, accompagnée de son mari Bernard et bien sûr Mégane avec ses yeux bleus perçants, qui en disent tant sur sa détermination.

Agriculteurs de père en fils

Les Moissonnier agriculteurs à Lent, c’est une histoire de famille puisque Bernard se retrouve à la tête de l’exploitation à 20 ans au retour de son service militaire et au décès de son père. Il se confie : « Je n’ai pas eu le temps ni l’occasion de profiter de l’insouciance de la jeunesse, je me suis retrouvé soutien de famille avec une petite sœur de 2 ans. J’ai été tout de suite confronté aux responsabilités et au dur travail d’une exploitation agricole. » La ferme exploitait déjà des chevaux en plus des vaches sur 80 hectares (il pense que son grand-père en avait déjà). Les vaches et les chevaux sont ensemble dans les prairies comme en Normandie. Bernard, qui était alors membre de l’équipe de France de complet, n’a pas eu d’autre choix que de tout consacrer à son métier. Et comme la passion du cheval est là, il développe cette activité avec succès. Le travail ne manque pas à la ferme et le commerce des chevaux s’avère bientôt plus rentable que les bovins. En 2015, suite à une opération de la hanche, Bernard et Christiane décident d’arrêter les vaches, pour se consacrer uniquement aux chevaux. À ce jour c’est 60 chevaux et l’autonomie en herbe, foin et paille car la ferme produit aussi du blé. L’éleveur est aussi un membre actif du Syndicat des éleveurs de chevaux de sport de l’Ain où il fait profiter de son expérience, de sa sage parole et est toujours disponible à aider, ici au montage des obstacles, là à tenir une chambrière.

Proche de la nature

Revenons à la jeunesse de Mégane, qui toute petite monte sur les veaux, les poulains et s’épanouit dans ce monde où les valeurs sont le travail, le respect de la nature avec ce qu’elle nous donne au moment où elle nous le donne, l’écoute des aînés et la notion des vraies choses importantes dans la vie. Le tempo, ce sont les saisons et la météo qui le donnent. Bernard se rappelle qu’un jour, alors qu’elle avait 2 ans, il l’a trouvée entre les jambes d’un entier, en train de lui faire des papouilles sous le ventre. C’est à ce moment que la décision est prise de lui acheter son premier poney. Depuis Mégane ne pense plus qu’à ça et sa jeunesse est rythmée par le passage de ses galops, la compétition, sa formation et son ascension dans ce sport qui est sa passion tout en étant ancrée dans ce mode de vie rurale. Elle ne néglige pas sa scolarité, bien au contraire car elle est une élève brillante et passe ses diplômes en comptabilité afin d’être assurée en cas de pépin. Le bon sens terrien est plus que présent dans son esprit.

L’aventure avec Laurent Guillet

Diplôme en poche, elle monte sa micro-entreprise de cavalière professionnelle et c’est là que Laurent Guillet rentre dans le jeu. Il fait, à la même époque, une chute à cheval et demande à Mégane de le remplacer en attendant son rétablissement.

Mais force est de constater que la petite a du talent à revendre. En homme de cheval averti, Laurent décide de prolonger l’aventure et depuis c’est la fulgurante ascension que tout le monde connait maintenant.
Christiane sa maman, elle aussi est une fille d’agriculteurs avec des chevaux à Chalamon (à 15 km de Lent) où la famille Maure est connue sous l’affixe « du Gas ». D’ailleurs son frère Raymond fait perdurer cet élevage familial de grande qualité sous l’affixe Karka, en trustant régulièrement les trophées jeunes chevaux
Elle aussi était une cavalière de CSO à haut niveau en son temps. Le gène cheval et l’environnement agricole sont à tous les étages dans cette famille et Mégane ainsi que son demi-frère Eddy ne pouvaient pas passer à côté. C’est Christiane qui consacrera la partie de son temps indispensable à l’accompagnement de ses enfants dans la construction de leur carrière équestre, Bernard devant prioriser la ferme.
Quand on lui parle de cet étonnant sang-froid que montre sa fille lors des grands évènements,  elle confie : « Je pense que Mégane a toujours eu ça en elle, que son environnement et son éducation sont la clef de cette capacité mentale qui lui permet de relativiser ce qui est vraiment important dans la vie. De plus elle a encore sa chambre chez nous et revient régulièrement se replonger dans l’ambiance familiale ».
Pour perpétuer cette saga « agro-équine-familiale », Eddy Seguin Maure le demi-frère de Mégane, aussi cavalier et aussi talentueux, vient d’ouvrir sur la ferme une structure de formation et valorisation jeunes chevaux avec sa compagne.
Peut-être par la suite, prendront-ils la relève du couple à la tête de la ferme et ainsi pérenniser toute ces générations d’éleveurs passionnés. Il est de plus très complice avec sa demi-sœur.
On laissera le mot de la fin à notre cavalière préférée : « La saison va se terminer avec Genève.  Ensuite ce sera les vacances au soleil, j’en ai besoin, après une longue saison, inédite pour moi, ou j’ai vécu entre hôtels et camions ».
Nous lui souhaitons de bien profiter des vertus de la chaleur et de la lumière et de nous revenir pour une saison 2023 encore plus prolifique en exploits et qui sait (chut il ne faut pas en parler), d’une participation aux Jeux Olympiques de Paris 2024 mais ça, c’est une autre histoire. Et si c’est le cas, c’est sûr, la ferme montera à Paris.

Pierre Cogne

20/12/2022

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