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De La Guérinière à Pat Parelli en passant par Oliveira   par Jean-Noël Marie*

Mettre la question technique - ou plutôt technicienne - de l’art de monter à sa place, c’est-à-dire seconde ?(non pas subalterne ). Quelle devrait être, d’abord, l’attitude à avoir avec le cheval. Et soi-même. Une morale et une philosophie Photo 1 sur 1
sont implicitement diffusées. Mais avec « légèreté », ce qui ne saurait surprendre…

Le relation cavalier-cheval est posée, avec insistance, comme étrange. Les coutumes et l’habitude sont, comme on sait, mauvaises conseillères. Il faut donc faire une sorte de révolution copernicienne, se mettre d’abord à la place du cheval. Le cavalier tourne autour du cheval.

L’éthologie, les comportementalistes et Pat Parelli interviennent ici. C’est moderne : Michel Henriquet n’est pas le nostalgique vaguement « versaillais » et condescendant que l’on a pu dire parfois. Il est passé lui-même de Bacharah / Baucher à Oliveira et, maintenant, peut admirer le travail de Parelli.

La « tradition » est à prendre au sens plein : ce que, aujourd’hui et maintenant, on fait de l’héritage. Oliveira retrouve La Guérinière, Henriquet retrouve La Guérinière et Oliveira et Parelli retrouve les intuitions de ceux-ci. Avec son stetson et ses jeans ?(lui-même scandalisé par la brutalité du débourrage western.)

  

Donc, de la douceur avant toute chose. Et aussi de la cohérence. Le cheval doit comprendre peu à peu et sans contradictions entre les aides et - dans une situation et une relation « étranges » - parvenir à y prendre un certain plaisir.

La seconde partie - dès la page 107 - est plus technique. Mais en conformité avec les principes comportementalistes affirmés avant. Proposer graduellement au cheval tel ou tel exercice, « prendre et rendre », récompenser, s’arrêter dès le mouvement obtenu, légèreté, ne pas confondre « tension » des rênes avec contact léger, au « poids du cuir » et, constamment, négocier, assiette souple, dos actif et doigts moelleux, etc.

Sont dénoncés :

- l’usage des rênes allemandes, donnant un faux placer et faisant faire l’impasse, au prix d’un résultat immédiat mais sans lendemains, sur le travail gymnique et l’assouplissement progressif,

- le manuel officiel de la FFE : le reculer ou la descente d’encolure, par exemple, à obtenir, l’un et l’autre selon le même principe de la porte fermée au nez - ou aux naseaux : action des jambes pour le reculer, le cheval se reçoit sur les rênes bien closes, que fait-il ? comme vous et moi, il recule ; élévation des mains pour la descente d’encolure, le cheval sent qu’on lui tire dessus, que fait-il ? il cherche à se soulager de la tension, il tire vers le bas, c’est le « bon sens » même,

- l’absence de formation des enseignants français au débourrage, essentiel pour la mémoire-de-cheval du cheval,

- tout procédé de contention et d’« asservissement » pour obtenir aux yeux « des juges » un ?résultat spectaculaire mais faussé à la base.

Remarquable - au sens étymologique - est la simplicité du propos. Des leitmotive, ou les basses continues de la musique baroque, c’est bien le moins, puisque, ici, le fondu-enchaîné sur l’Ecole de Versailles est ?constant : travail à pied, assiette, dos, contact, jeu des doigts, rênes qui « respirent », le « jambe sans main et mains sans jambes » de Baucher, la mobilisation des hanches par l’épaule en dedans - exercice fondateur chez La Guérinière - , l’usage de la rêne extérieure pour les changements de direction et relever la nuque, l’action des mains de haut en bas, l’impulsion, le brillant, obtenus par le travail, le long travail etc., etc.  

On sent que l’écuyer lui-même est parvenu, après des décennies de recherche, à la simplicité des plus grands (celle des propos d’Oliveira par exemple) ou à la clarté d’exposition de La Guérinière. Les vrais maîtres ne « font pas les intelligents » devant vous, ils vous rendent intelligents.

Ce livre (« cent fois sur le métier »…) est, ainsi, un hommage à la première disciple, Catherine Henriquet, dont on sait le palmarès dans les épreuves du plus haut niveau et dont les photos représentent l’essentiel de l’iconographie. Michel Henriquet rend la main sans mélancolie. Souple dans ses bottes.

* Ecrivain et auteur de « Le cavalier à la charrette » Gallimard 2004

C. et M. Henriquet, Comportement et dressage, Belin, 2009, 204 p.

18/02/2010

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