- Toute l’actualité du cheval et des sports équestres

Portrait : Olivier Robert « Je sens que j’ai progressé »

  • Quenelle du Py et Olivier Robert à Lure (© ER)
    Quenelle du Py et Olivier Robert à Lure (© ER)
Aujourd’hui âgé de 40 ans, Olivier Robert est un sportif accompli. Après la vente de sa jument Raia d’Helby en 2014 à l’Américaine Adrienne Sternlicht, élève de Laura Kraut et Nick Skelton, c’est la jument Anglo-Arabe Quenelle du Py (Tresor du Renom x Mam’zelle de Buissy x Ryon d’Anzex) née en Lot et Garonne qui fut sa jument de tête. La Grande Dame Alezane a pris ce rôle de locomotive et d’exemple très à cœur puisqu’elle aura offert à son cavalier de très beaux accès site, dont une victoire dans le Grand Prix 3* de Valence l’année dernière, une victoire dans le Grand Prix 3* de Megève cette année et de très nombreux classements en Grand Prix nationaux et internationaux de Wellington à Londres, en passant par Lyon et Helsinki. Aujourd’hui dans le top 20 du classement Coupe du Monde après seulement deux étapes courues (une 12e place à Helsinki et une 5e place à Lyon), le Bordelais a désormais les yeux rivés vers Omaha, lieu où se courra la finale. Nous avons rencontré le cavalier bordelais peu de temps avant l’étape Coupe du Monde de Stuttgart. Il fait le point avec nous sur sa saison, son couple avec Quenelle et sur son petit phénomène Tempo de Paban.


LC : Comment vas-tu après cette belle saison ?


Olivier Robert : « Je vais bien parce que la saison se termine très bien. Les chevaux ont fait une année correcte. Il y a eu des haut, il y a eu des bas, et il y a eu des très bas. Mais la fin de saison se termine de façon magnifique pour mes chevaux de tête. Pour les autres chevaux, la saison a été convenable. Il n’y a pas eu de très grands résultats mais la plupart d’entre eux ne sont âgés que de 7-8 ans et ils sont en train de se construire. Vivaldi des Meneaux (Chippendale Z x Bamako AA) et Vangog du Mas Garnier (Cornet Obolensky x Quidam de Revel) sont sortis de l’ordinaire dans leur saison de 7 ans, donc fatalement je suis très heureux. Si on pouvait trouver la saison un peu mitigée avant Helsinki, Quenelle a repris le dessus en indoor comme d’habitude tous les ans. »


LC : Depuis l’année dernière tu sembles avoir encore progressé dans ton couple avec ta jument, quel est ton sentiment là-dessus ?


O. R. : « Je pense que c’est moi qui ai progressé. La jument était déjà à très haut niveau il y a un an et je me suis un peu perdu dans ma saison à aller dans des concours qui n’étaient pas adaptés malgré les mises en garde de Philippe Guerdat. La jument était par contre très bien. Pour la première fois elle a eu quelques problèmes dans ses chaleurs, ce qui nous a un peu noirci le tableau un moment donné. Mais quand je fais le remake de la saison elle a gagné autant que l’an dernier et dans les cinq Grand Prix Coupe du Monde qu’elle a faits (la saison passée et cette saison), elle fait 4 sans-faute. A chaque fois j’ai raté mes barrages à part à Lyon mais à l’arrivée c’est une super saison. »


LC : As-tu changé quelque chose dans la façon de travailler et de gérer ta jument ?


O. R. : « On change beaucoup et assez régulièrement les choses pour essayer de progresser et d’évoluer. Il y a un mois et demi j’étais à Calgary et Philippe (Guerdat ndlr) m’a fait monter avec un filet simple, ce que voulaient déjà Michel Robert et Joëlle Caïraschi Dagut depuis un moment, et ce fut une nouvelle révélation qui a permis à la jument de franchir un cap supplémentaire. Malheureusement avec Quenelle, j’ai depuis toujours des problèmes de blessures au niveau des commissures des lèvres, apparemment comme sa maman et sa grand-mère. Je devais monter à Helsinki et à Lyon en filet, mais la jument présentait ces blessures donc j’ai dû remettre le hackamore. J’arrive seulement à la travailler sur le plat en filet mais la plaie est toujours bien présente. »


LC : Comment as-tu vécu ton ascension avec Quenelle ?


O. R. : « La jument m’appartient depuis qu’elle a 3 ans donc il y a eu des hauts et des bas autant avec moi qu’avec Marie (Demonte ndlr). Elle est en constante progression et là elle atteint le sommet à 13 ans. »


LC : Elle a encore progressé entre l’hiver dernier et cet hiver !?


O. R. : « Oui tout à fait, elle a encore progressé en un an. Michel Robert et Philippe Guerdat ont eu une discussion à ce sujet et étaient d’accord sur le fait que la jument était même en train de progresser en ce moment. »


LC : Donc il n’y a pas que ton évolution à toi, il y a aussi celle de la jument ?


O. R. : « Oui bien sûr, mais ça vient beaucoup de moi. Quand ça va c’est que je vais bien, et quand la jument ne va pas bien c’est que c’est moi qui monte mal. »


LC : Qu’est-ce que la collaboration avec Andy Booth t’a apporté avec Quenelle ?


O. R. : « C’est plus ce que Andy m’a apporté avec Tempo, et en règle générale avec les autres chevaux qui m’a permis de progresser. Par exemple avoir une jument qui marche droit, obtenir plus de relâchement … Quand on a plus de relâchement, on a plus de respect de l’obstacle. C’est passé par là. »


LC :  Nous allons nous pencher sur ta deuxième pépite anglo-arabe de 9 ans, Tempo de Paban AACR (Jarnac x Quatar de Plape) que le grand public a véritablement découvert à Lyon en Grand Prix 160 lors des Equita Masters presented by Equidia Life, comment s’est passée sa montée en puissance ces dernières semaines ?


O. R. : « J’ai vécu, ainsi que Marie (Demonte ndlr) puisqu’elle le montait à l’âge de 4 ans, un cheval d’une complexité impressionnante mais d’une gentillesse rare avec un vrai amour de l’homme. Il est un peu particulier, comme habité, mais le temps fait son travail. En fin d’année de 9 ans il arrive à sauter ses premiers parcours à 1m60 avec la manière. C’est juste un génie. »


LC : Quelle est l’histoire de Tempo ?


O. R. : « Il est arrivé aux écuries à Pompignac pour le débourrage à l’âge de 2 ans. Carmen, son éleveuse, nous les envoyait toujours à cet âge-là pour le débourrage. Tempo ne ressemblait vraiment à rien * rires *. Et mea culpa pour moi, j’avais dit « il faut le vendre » parce qu’il y avait trois chevaux à garder pour Carmen et celui-là n’en faisait par partie. Elle avait Pidam de Paban, Ringo de Paban et Riesgo de Paban qui étaient aussi présents à ce moment-là et semblaient bien mieux, mais en le vendant à cet âge-là j’aurais eu l’air malin *rires*. L’histoire a commencé comme ça et j’ai fait l’acquisition de Tempo à l’âge de 4-5 ans. Carmen était très contente qu’il reste à la maison, et à l’arrivée on a fini par vendre une part à Jacques Grandchamp des Raux. Voilà où nous en sommes aujourd’hui. J’ai eu Carmen au téléphone la semaine dernière après Lyon, et elle est très heureuse de le voir encore à la maison. »


LC : Qu’est-ce que la collaboration avec Andy Booth t’a apporté avec Tempo ?


O. R. : « Avant qu’Andy vienne s’installer à la maison, je lui avait demandé un stage qu’il avait donné à la maison. Je suis ensuite parti à Oliva et le cheval a eu une progression terrible. Il avait très bien sauté. J’avais des problèmes sur le bleu avec le cheval, et on a bien amélioré les choses. Aujourd’hui on ne se voit pas beaucoup avec Andy parce que nous sommes tous les deux beaucoup en déplacement, mais le peu de fois où il a eu à manipuler Tempo de Paban, à chaque fois derrière je sentais le cheval changé de façon fantastique. Il a besoin de ce contact avec l’homme, de ce respect de l’homme. L’apport d’Andy est vraiment exceptionnel. »


LC : Comment vois-tu ton avenir avec Tempo ?


O. R. : « Tempo est en train d’enclencher le niveau. C’est sûr que si Quenelle prenait quelques points supplémentaires entre Stuttgart et Madrid, ça laisserait présager que Tempo sauterait un peu plus rapidement de très grosses épreuves. Il a la chance d’avoir Quenelle devant lui, comme Quenelle a eu Raïa devant elle à une époque. Ça leur permet de respirer, de voir ces nouvelles pistes, ces nouvelles configurations et ces nouveaux chefs de pistes dans des contextes particuliers. »


LC :  Tu es le seul cavalier à sortir des Anglo-Arabes à très haut niveau, comment vis-tu ton rôle « d’ambassadeur » ?


O. R. : « Malheureusement les Anglos sont bien moins nombreux que les chevaux des autres races. Maintenant, pour parler de Quenelle, c’est une jument qui a des moyens hors normes. Ces trois dernières années, elle a fait une quinzaine de Grand Prix à 1m60 par an et elle n’a jamais lâché prise. Aujourd’hui tout le monde accepte de dire qu’elle galope mal, que son physique est plus fait pour galoper sur un champ de course à Longchamp, à Auteuil ou encore à Pau, plutôt que de sauter à Lyon, Bordeaux ou à Calgary. Elle est très spéciale. Donc oui c’est une Anglo-Arabe, mais elle a les moyens de beaucoup de Casall ou de Cornet Obolensky. »


LC : Comment sont Quenelle et Tempo au quotidien en dehors du travail monté ?


O. R. : « La partie difficile est passée avec Quenelle quand elle avait 9 ans, parce que jusqu’à présent elle était juste exécrable. Marie (Demonte ndlr) l’a montée à 4 et 5 ans, puis je l’ai montée une saison à 6 ans, et Marie l’a récupérée derrière à 7 ans. Elle avait un comportement très complexe. Elle s’est d’ailleurs blessée à plusieurs reprises de par son comportement. Une fois elle s’est couchée dans les boxes à Barcelone de peur, une autre fois elle s’est fauchée en tournant à la longe à Muret. Elle a toujours eu 6 mois d’arrêt dans ses années de 7-8 et 9 ans mais ça a peut-être été une chance aussi parce que le temps lui a permis de bien se construire dans son corps, bien dans sa tête et à 10 ans je me suis retrouvé avec une crack. Elle a fait de belles saisons à 10-11 et 12 ans en ne souffrant pas. Dans son corps elle a aussi été gérée magnifiquement par mon vétérinaire Franck Pénide. A l’arrivée je me retrouve avec une jument de 12 ans qui est dans son corps comme une jument de 8 ou 9 ans.


Tempo, au quotidien, est plus difficile qu’était encore Quenelle dans ses jeunes années. Mais le temps a fait son travail, l’hiver va encore passer et j’aurai encore un nouveau cheval à 10 ans. Il est apte à sauter du très haut maintenant à 10 ans. Il était complexe plus jeune mais pas de mauvaise volonté, juste de ne pas comprendre. Au final je me retrouve avec un super cheval. Alors, c’est sûr il n’a pas gagné la finale des 6 ans, il n’a même pas fait la finale des 7 ans, mais à l’arrivée ce qui est important c’est de pouvoir sauter la Coupe du Monde sans-faute à 10 ans. Je pense qu’il ne sera pas loin du compte, et s’il n’y arrive pas c’est que c’est moi qui me serai trompé. »

24/11/2016

Actualités régionales