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Marie-Dominique Saumont-Lacoeuille, présidente de l’ANPFS « Le Poney Français de Selle, la race d’avenir »

L’évolution de la race, son positionnement à travers l’Europe, en passant par le Programme d’Elevage et la formation des jeunes poneys : Marie-Dominique Saumont-Lacoeuille, présidente de l’Association Nationale du Poney Français de Selle (ANPFS) Photo 1 sur 3
a accepté de se livrer au jeu des questions-réponses

Quels sont les chiffres clés de ces dernières années, d’une part en terme d’adhérents à l’ANPFS et d’autre part, en nombre de naissances de Poneys Français de Selle ?

Nous avons eu une baisse d’adhérents assez significative à partir de 2006 puisque les cycles classiques sont passés dans les mains de la SHF à ce moment là. Nous étions donc avant 2006 à 652 adhérents et depuis, nous oscillons entre 380 et 400. Cette baisse s’explique clairement par le passage des cycles classiques vers la SHF.

En terme de naissances, l’année culminante fut 2003, avec 1 397 naissances enregistrées. Globalement, toutes les races sont un peu en diminution depuis plusieurs années : en 2007, nous recensions 1 061 naissances d’après le SIRE. Je pense que cette baisse est due en partie au fait que certains éleveurs fassent des saillies hors stud book, notamment les croisements poneys x chevaux. Cependant, nous avons plus de ponettes Poney Français de Selle (PFS) qui produisent en Poney Français de Selle. Avant effectivement, nous piochions dans la jumenterie des autres races, mais maintenant de moins en moins. Il y a malgré tout des croisements avec d’autres races de poneys de sport (Welsh, New-Forest et Connemara) mais nous trouvons beaucoup plus de poulinières PFS qui donnent l’immatriculation PFS. Cette tendance augmente régulièrement depuis 2000.

Quelle est l’évolution de la race depuis ses débuts ?

Même si elle évolue encore, nous avons une race qui a tendance à s’harmoniser beaucoup plus. Maintenant, lorsque nous allons dans nos championnats nationaux, nous voyons immédiatement qu’il s’agit d’un Poney Français de Selle. Nous allons continuer notre sélection, nous savons vers quoi tendre. Le Poney Français de Selle est la race d’avenir !

Justement, ce qui était reproché aux Poney Français de Selle c’était ce manque d’homogénéisation...

Oui, c’était « pique, cœur carreau ou trèfle » ! Le Poney Français de Selle est une race de croisement et effectivement nous trouvions toutes sortes de types. Maintenant, malgré tout, il y a encore des croisements avec d’autres races, mais cela tend à s’harmoniser et même si l’on se dit « tiens il y a peut être du welsh ou du Connemara derrière » les produits sont quand même beaucoup plus proches les uns des autres.

Aujourd’hui, nous constatons beaucoup de croisements poneys x chevaux. Qu’en pensez-vous ?

Effectivement il y en a pas mal. Dans les immatriculations, nous le voyons bien. Par exemple, dans les naissances de 2006, nous trouvions 118 Origines Constatées (OC) et dans ce chiffre, il y a vraisemblablement pas mal de croisements poneys x chevaux. C’est une tendance. Malgré tout, ce croisement doit être réalisé par des éleveurs très avertis, car on ne fait pas saillir n’importe quelle ponette par un cheval. Si l’on ne fait pas suffisamment attention à la souche maternelle, on aura un produit qui ne sera pas intéressant. Je suis vraiment une adepte des souches maternelles. La génétique femelle est très importante. Il faut connaître ses juments, savoir leurs potentiels et leurs génétiques, ce que l’on veut faire avec et les marier de façon raisonnée. C’est un savoir faire d’éleveur qui ne peut s’acquérir du jour au lendemain. Il y a de nouveaux éleveurs qui arrivent et qui tentent de faire ce croisement poneys x chevaux. S’ils ont une très bonne ponette et qui en plus est bien dans sa tête, ils peuvent le faire, mais je pense que ce n’est pas quelque chose dans lequel on peut engager des éleveurs qui ne s’y connaissent pas. Il faut faire attention, il y a des croisements qui vont réussir et d’autres qui vont être hors taille ou difficile au niveau de la gestion du tempérament. Il y a forcément des choses intéressantes qui vont sortir et mais il y aura aussi des ratages. Le niveau technique que l’on demande à des poneys dans les grosses séries est tellement élevé qu’il est sûr que les simples poneys vont avoir du mal dans les années à venir. La taille des poneys est passée à 1,51 m pour être en phase avec la FEI mais on va aussi faire grandir nos poneys, on va aussi leur apporter peut être trop de sang cheval et puis les « vrais » poneys, enfin de souches poneys, n’auront plus leur place. Alors oui, dans notre race, il y a une place pour ces croisements poneys x chevaux, mais il faut que ce type de croisement soit très bien géré. Et là, au niveau de la gestion des étalons, l’ANPFS sera peut être obligée de regarder le % de sang cheval et de faire attention car elle a en charge le devenir de la race. C’est très intéressant, je le pratique moi même. Mais ce qu’il faut se dire, c’est qu’avec ce croisement, on ne gagne pas à tous les coups.

Quels sont les autres projets de l’ANPFS, vos perspectives futures de travail ?

Nous mettons en place cette année une aide à la jeune génétique. C’est à dire que nous aiderons les éleveurs qui vont utiliser les 2 et 3 ans de 2008 en ce qui concerne le surcoût lié au congelé. Nous aidons les éleveurs qui n’auront pas ces étalons là à proximité pour qu’ils puissent les utiliser. Globalement, cette aide avoisinerait les 200 € mais cela va dépendre du nombre d’éleveurs intéressés. Cette orientation a été choisie dans le but d’obtenir un retour rapide de cette jeune génétique mâle.

De plus, nous voudrions nous servir d’avantage du Programme d’Elevage (PE) pour mettre en évidence l’élite. Pour l’instant, nous inscrivons les poneys dans le Programme d’Elevage et nous donnons des labels, mais petit à petit, nous aimerions dégager les souches « élites » au niveau production et performances propres, des éléments qui seraient le plus près possible de la meilleure amélioration génétique. Nous allons donc essayer de mettre en évidence tous ces éléments là par le Programme d’Elevage, chose que nous avions pu réaliser puisque le PE est tout récent.

Faire une belle épreuve de qualification étalons fait aussi parti des projets de l’ANPFS, à l’image de ce que nous avons commencé à faire l’année dernière. Les mettre bien en valeur, c’est très important, car c’est ce qui tire vers le haut le reste du stud book. Nous allons donc essayer de continuer sur cette voie là et d’améliorer encore l’organisation de l’évènement en introduisant de la musique le soir, des éclairages. C’est ce que font les étrangers d’ailleurs et c’est très valorisant.

A propos du Programme d’Elevage, l’un des objectifs clairement identifié est donc celui inéluctable de conforter la place de la race sur le marché français mais également, de développer son image à l’étranger. Y a t’il eu des actions de déployées pour y parvenir ?

Nous sommes malheureusement un peu mauvais élèves. Enfin, ce n’est pas vraiment cela, il nous manque plutôt les moyens financiers. Le Poney Français de Selle à l’étranger c’est quelque chose d’assez difficile parce qu’il faudrait vraiment partir avec son sac à dos et aller faire tous les salons à l’étranger. Il ne suffit pas d’y aller sans animaux ! D’autre part, il faut communiquer sur les Poneys Français de Selle qui sont à haut niveau et qui font les Championnats d’Europe, certes avec de la génétique étrangère dans le papier mais pas uniquement. Il faut se servir de cela. Ce qu’il faut dire aussi, c’est qu’il part pas mal de PFS à l’étranger, mais que l’on en perd vite la trace car souvent ils les rebaptisent. De plus, les résultats des poneys résidants à l’étranger ne sont pas pris en compte dans le calcul des indices. Je me rappelle que nous nous étions servis d’une photo d’une ponette qui a participé à plusieurs Championnats d’Europe et qui était rebaptisée, c’était Eclipse d’Avril (PFS). C’est un exemple de poney qui est parti et dont nous avions perdu la trace.

Quel est le positionnement de la race Poney Français de Selle à travers l’Europe ? Ses qualités et les points à améliorer ?

Par rapport au voyage d’étude que nous avons fait en Allemagne (Championnat de Wesphalie des mâles de 2 ans), en novembre dernier, nous n’avons pas à avoir honte des poneys que l’on élève. La comparaison est difficile, c’est autre chose : nous ne sélectionnons pas de la même façon et nous n’avons pas la même culture. Nous avons un savoir faire au niveau de l’élevage. Nous avons cependant des progrès à faire en ce qui concerne la locomotion. Les poneys allemands ont une locomotion fantastique, ils sont sélectionnés sur ce critère. Ils sont aussi très près du sang et très bien éduqués. Par contre, au concours de Wesphalie, j’ai remarqué qu’ils sautaient moins bien que les nôtres. Nos poneys sautent, et nous n’avons rien à envier à personne à ce niveau là. Il faudrait que nous arrivions à améliorer leur look, qu’ils aient une certaine expression, et plus de locomotion. Mais, dans la mesure où il est très difficile de tout avoir, la locomotion et le geste à l’obstacle, il faut bien faire attention à ne pas détériorer cette aptitude au saut. On a de très bons poneys d’obstacle en France. Malheureusement, le dressage reste en France un tout petit créneau.

Comptez-vous retourner à l’étranger et voir d’autres manifestations d’élevages ?

Oui je l’espère, parce que l’on apprend énormément de choses, au niveau organisation, au niveau élevage, observer les autres poneys, la façon dont ils les élèvent, dont ils les sectionnent, c’est très intéressant. L’ANSF le fait, et je pense que l’on apprend toujours en allant à la rencontre de ce qui se fait chez nos voisins, et de savoir à quel niveau nous nous situons en France. En Allemagne, nous avons rencontré le président du stud book de Wesphalie et nous nous sommes renseignés sur leurs qualifications étalons. Nous nous sommes aperçus aussi que nous rencontrions des problèmes similaires : Ils ont à peu près le même souci que nous au niveau de la taille des poneys.

De plus en plus de poneys français intègrent les équipes étrangères de CSO et CCE. Pensez-vous qu’il y a eu une amélioration de l’élevage en France, une prise de conscience, ou au contraire y’a t’il toujours eu de très bons poneys ?

Il y a eu une amélioration. A haut niveau, les difficultés sont de plus en plus grandes. Ce que l’on demande aux poneys est absolument énorme, si l’on fait le rapprochement avec des chevaux de grandes tailles. De fait, la génétique, la sélection sur l’aptitude à l’obstacle et les croisements poneys x chevaux y sont pour quelque chose. Je pense que nous allons continuer sur cette voie là. A haut niveau, il n’y aura quasiment plus que des croisements avec un apport de sang cheval, à part des exceptions comme Dexter ou d’autres poneys « pure race » qui ont beaucoup de force. Il reste quelques poneys de souches mais, petit à petit, je pense que ce seront les poneys de croisement qui arriveront à ce niveau là.

Au niveau « information » aussi, nous nous sommes améliorés. En France, les jeunes éleveurs ont la chance de pouvoir bénéficier de guides et d’outils en terme d’élevage, d’étalons, d’indices. Ils peuvent aussi demander conseils auprès de leur association de race. Ce que je déplore un peu, c’est l’utilisation à outrance des forums internet. Moins les gens ont d’expérience et plus ils ont de solutions miracles !

Quel est votre point de vue sur les exportations de poneys français à l’étranger ?

Un certain nombre de poneys se vendent à l’étranger. En tant qu’association d’éleveurs, nous n’avons pas tous les retours mais il est vrai qu’il en part pas mal. Les étrangers sont très bien coachés à haut niveau et moins compliqués au niveau ?« prix » des poneys.

C’est à dire ?

En France, les parents ne sont pas assez ?« connaisseurs ». Ce qu’ils veulent, c’est que leur enfant soit premier. S’il ne gagne pas, c’est de la faute du poney et ils cherchent des histoires pas possibles au vendeur. Donc parfois, plutôt que le poney reste en France, les gens préfèrent vendre à l’étranger. Nous avons de bons professionnels en France, de bons enseignants, mais nous avons une pyramide qui est très large à la base. En Allemagne par exemple, ils n’ont pas tous ces licenciés à poneys ; ils ne sortent pas en compétition – sauf en dressage – tant qu’ils n’ont pas acquis les bases. Chez nous, tout le monde sort en concours très tôt, d’où également la clientèle très importante pour le milieu du poney. Bien sûr, au fur et à mesure, le niveau s’élève et les enfants bien coachés trouvent les montures adaptées...

Quel est votre sentiment par rapport au Sologn’Pony de 2008 ?

Nous pouvons être fiers des poneys qui nous ont été présentés au Sologn’Pony. Nous sommes très contents de l’édition 2008, car nous avons eu 1 700 poneys. En épreuves d’élevage pour notre race, nous avons enregistré environ 140 PFS. C’est une manifestation qui est quand même assez exceptionnelle. Ce que nous pourrions regretter, c’est qu’il n’y ait pas plus de races. Je pense que la manifestation serait gérable avec même le rajout des autres races de sport, ou au moins les catégories d’utilisation (3 ans montés etc). On pourrait tout à fait s’articuler entre nous. Je pense que les associations de race de sport auraient tout à y gagner. De notre côté, nous avons constaté une forte clientèle, du commerce. La force : l’articulation entre les cycles classiques et les épreuves Ponam allant jusqu’au Grand Prix. La compétition crée l’émulation et le commerce !

Adoptez-vous une politique de communication internationale ? Y a t’il des moyens mis en place pour attirer ou inviter les étrangers au Sologn’Pony ?

Nous avions invité des belges il y a quelques années. Certains reviennent. Nous avons aussi des contacts avec les italiens, les espagnols. C’est une politique qu’il faut encore développer indéniablement.

Que pensez-vous de notre circuit « poney », en comparaison avec ce qui se fait à l’étranger ?

L’éleveur cherche à présenter au mieux son jeune produit puis à le préserver ensuite pour les compétitions sportives. Il faut donc un bon circuit de formation pour que l’enfant qui récupère le poney ait une monture suffisamment bien formée. La France peut se considérer comme une référence maintenant, autant sur le circuit des cycles classiques pour jeunes poneys que le circuit fédéral des enfants. Nous avons un circuit exemplaire, qui permet aux cavaliers et poneys de tous niveaux de s’exprimer. Alors, effectivement ce qui peut être discutable c’est le nombre trop élevé de podiums aux Championnats de France, il y a beaucoup de séries... Mais pour les éleveurs ce n’est pas plus mal. Cela leur permet de commercialiser leurs poneys.

En tant que Présidente de la commission Poney à la SHF, pouvez-vous nous parler de la formation des jeunes poneys ?

Il faut insister sur la formation des jeunes poneys. Nous avons appuyé, auprès de la SHF, la création d’un circuit cycles classiques de concours complet. Il va donc être mis en place en 2009. Ce circuit va aider à former les poneys et à mieux les dresser. En 2009, le circuit sera proposé aux 5 et 6 ans, de taille D. Les poneys seront sélectionnés sur les épreuves de la tournée des as, les régionaux et les inter-régionaux, afin que les meilleures conditions soient réunies. La finale se courra en septembre à Pompadour. Nous mettons cela en place cette année et nous apporterons, si le besoin se ressent, les modifications nécessaires. Les poneys auront également le droit de participer à la fois aux cycles classiques CSO et CCE.

Ce n’est pas une nouveauté en soi ce circuit CCE pour les jeunes poneys ?

Oui, effectivement des cycles classiques CCE pour les poneys ont été proposés il y a quelques années, mais cela avait été très difficile à mettre en place. Je ne pense pas que cela sera plus facile cette année, mais disons que nous nous appuierons sur des épreuves qui existent déjà. Peut être que pour la première année, nous n’aurons que 20 poneys, mais nous allons essayer. Je suis persuadée que le complet est une excellente formation. On prend le temps de dresser les poneys. Pour eux et pour les enfants, c’est véritablement une discipline très pédagogique.

Propos recueillis par Pauline Bernuchon

15/01/2009

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