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Dans le sillage de La Silla

Invité par la SHF dans le cadre des rencontres internationales qu'elle organise depuis 4 ans à Bordeaux, Alphonso Romo, l'éleveur mexicain de La Silla (du nom de la montagne en forme de selle au nord de Monterrey) s'est prêté de bonne grâce au jeu des questions-réponses sur le thème de l'importance des souches basses dans l'élevage. Photo 1 sur 4


Ancien cavalier de haut niveau (J.O. d'Atlanta et de Sydney, championnat du monde à La Haye) Alphonso Romo a commencé l'élevage en 1997 avec des juments qui, toutes sans exception, ont obtenu de grandes performances sur les pistes. Alphonso n'est pas fixé sur un stud-book en particulier. « Il y a du bon partout dit-il, je prends toujours le meilleur, peu importe d'où il vient ». C'est la performance qui chez lui est primordiale, chez la mère comme chez le père. L'art d'élever, c'est l'art du croisement; Alphonso ne marie jamais ses cracks au hasard. Il a ses critères, connaît la force et la faiblesse des ses animaux, observe et décide. Certes, les 70 poulains qui naissent chaque année sur les 400 hectares qu'il possède au nord de Monterrey, ne seront pas tous des champions olympiques mais sa méthode de sélection est tout de même asez juste puisque les La Silla galopent sur la planète entière. A Bordeaux, il y en avait quatre dans les épreuves Coupe du monde. Ninja (Guidam), 2e à Lyon, concluait à la 3e place avec Rolf Goran Bentgensson, son cavalier suédois, devant son propriétaire ravi. « Je suis heureux quand mes chevaux terminent dans les cinq premiers. J'en ai une centaine qui tourne quelque part dans le monde. Vous savez, je ne suis pas un marchand de chevaux, je suis surtout un passionné ». Christian Hermon, son représentant français et le Belge Théo Molenaers qui l'accompagnent, confirment : Alphonso Romo, disent-ils, est d'abord un authentique homme de cheval et un naisseur guidé par la passion.

Confrontation de points de vue

Jean-Pierre Laborde, un journaliste de radio et de télévision très au fait de la chose cheval, modérait cette matinée qui, comme les autres, passa trop vite pour la centaine d'auditeurs. Bernard Le Courtois, Jean-Pierre Herpin, Hélène Hermann, Bertrand Pignolet et Alphonso Romo ont échangé leurs points de vue pendant deux bonnes heures sur leur vision des souches basses dans l'élevage et l'apport des mères dans la génétique. Il y avait là un savoir-faire d'éleveurs de tout premier plan. Tous sont d'accord sur l'importance de la souche maternelle. Les uns comme les autres ont regardé, trié, sélectionné les mères avec le succès que l'on sait, tous sont d'accord aussi pour mettre en garde contre certains effets de mode détériorateurs, notamment pour ce qui est de l'utilisation sans discernement de certains étalons étrangers. « La bonne question à se poser, selon Jean-pierre Herpin, c'est de savoir si l'étalon qui vient de gagner la coupe du monde ou les Jeux Olympiques correspond bien à sa jument avant d'envisager un croisement ». Tout autre raisonnement peut en effet conduire à de graves désillusions. « L'ANSF, indique Bernard Le Courtois, incite les éleveurs a faire expertiser leurs juments pour connaître précisément les qualités et les défauts et envisager, en parfaite connaissance de cause, les bons croisements. Presque la moitié des éleveurs n'ont jamais vu leurs juments en concours. L'expertise est donc de première importance ».

Quand on parle sélection, on pense presque toujours voie mâle. « Le programme d'élevage de l'ANSF, précise encore Bernard Le Courtois, avait entrepris de favoriser la voie femelle en attribuant la prime PACE aux éleveurs qui mettaient leurs meilleures femelles à la reproduction à 3 ans. La disparition des primes pourrait avoir de graves conséquences sur la méthode ».

Avec les indices génétiques, l'éleveur a aujourd'hui à sa disposition des indicateurs fiables du potentiel génétiques des animaux. Reste toujours la question du quand et du comment de la sélection. Alphonso Romo avoue que la réponse est très complexe. Le saut en liberté, pour lui, à 2 et 3 ans est un indicateur assez fiable. « Si le cheval montre de l'intelligence et du respect, on sait tout de suite ce qu'il est possible d'envisager ».

Même avec tous les indicateurs de potentiel génétique au beau fixe, l'élevage ne sera jamais une science exacte et deux cracks n'engendreront pas systématiquement un crack. Tous les éleveurs le savent bien. Il y aura toujours cette part d'imprévu qui nourrit la passion et les discussions et cette part d'inconnu génératrice de rêves. Et cette intime conviction qui fait l'originalité et la grandeur de l'éleveur.

Merci à la SHF d'avoir favorisé ce grand moment de communion entre passionnés.

Etienne Robert

10/02/2011

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