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Race, déterminisme génétique, précocité et alimentation

L’obtention d’un animal ayant exprimé toutes les qualités que lui conférait potentiellement sa génétique est le but et la fierté de tout éleveur. Il convient donc de mettre chaque poulain et partant, chaque poulinière en amont, dans des conditions conformes à ses besoins spécifiques.


Les poulains des races de petits formats sont réputés plus précoces et moins sensibles à la qualité des apports alimentaires pendant le jeune âge. Ils sont souvent considérés comme rustiques et ne nécessitant ni aliment complémentaire ni apport de minéraux. Leur élevage traditionnel en troupeau, sous-tendait que les jeunes restaient très tard avec leur mère et bénéficiaient donc d’un apport de lait sur des périodes longues. Les pratiques actuelles d’élevage et de sevrage ainsi que les exigences en termes de qualité du poulain et de taux de survie remettent en cause cet équilibre.


Les sélections récentes dans le but d’améliorer l’esthétique, d’amplifier les allures ou de diminuer la taille comme chez les toys, ont éloigné certaines lignées de leur modèle traditionnel, amenant de ce fait à repenser leur alimentation sur de nouvelles bases. L’utilisation avec ces animaux des méthodes d’élevage traditionnelles sans tenir compte de leur évolution génétique peut conduire à des déceptions voire à des problèmes sévères.


Le reproducteur est le résultat à la fois de sa génétique, qu’on espère qu’il va transmettre et de ses conditions de vie. Cela signifie que pour que le produit les exprime à son tour, il faudra la science du sélectionneur mais aussi des conditions de vie comparables. Pour avoir un cheval miniature, il faut à la fois que ses gènes correspondent mais aussi que son alimentation soit celle d’un cheval toutes proportions gardées. Mettez-le sur une alimentation uniquement avec des fourrages de qualité moyenne comme pour un shetland et rapidement sa morphologie tendra vers celle d’un petit shetland, relativement loin des caractéristiques esthétiques recherchées pour sa race.


Si pour une race donnée, traditionnellement rustique, une alimentation plus libérale des poulains permettait d’augmenter le format au-delà des standards de la race, cela signifierait que les méthodes d’élevage traditionnelles ne permettaient pas la totale expression du potentiel génétique et donc que les standards ont été établis sur des animaux dont les croissances étaient systématiquement limitées par l’environnement.


Tous les chevaux atteignent à peu près leur poids adulte au même âge. Donc la vitesse de croissance du poulain est d’autant plus grande que son poids adulte sera important. Là où un poney de 200 kg adulte a une croissance moyenne de 220 g par jour entre 6 et 12 mois, un selle français pourra monter à 590 g/j et un trait à 800 g/j. Dans le cas d’un sevrage 6 mois, cette période clé de la croissance du poulain est totalement soumise à l’alimentation apportée post sevrage.


Pour les races à fort développement, considérées généralement comme plus tardives, on assiste donc à des poussées de croissance importantes chez le poulain qui exigent une attention toute particulière pour pouvoir être suivies sur le plan alimentaire. Du fait de leurs besoins plus importants, ce sont des poulains qui ont plus de risques que les autres de souffrir en cas d’alimentation insuffisante ou mal équilibrée.


On pense souvent à ce sujet aux races de type grand selle ou aux races allemandes de chevaux de sport ou de dressage. On pense beaucoup moins souvent aux grands traits type percherons, shires ou clydesdales dont les vitesses de croissance sont encore plus importantes mais qui sont réputés rustiques. Un critère de jugement de la qualité de rationnement d’un élevage est de comparer les poulains vers 4 mois avec les poulains de 1 an. Si les poulains de 4 mois sont beaux, cela signifie que la génétique est bonne et qu’elle s’exprime grâce à l’apport du lait maternel. Après cet âge, le lait ne suffit plus pour couvrir les besoins de croissance. Si vous retrouvez le même poulain nettement moins flatteur à 1 an, alors qu’il avait pris un bon départ dans la vie, cela remet en cause la qualité de l’alimentation apportée qui n’a pas été capable de prendre le relais.


On retrouve souvent sur certaines races, des problèmes osseux, tendineux, de pieds, de longévité moindre qui font penser à un déterminisme génétique voire à une caractéristique de la race ou de la lignée.


Mais on pourrait aussi légitimement se poser la question de savoir s’il ne s’agit pas en fait d’une simple prédisposition en rapport avec des besoins nutritionnels plus élevés et plus impératifs dans le jeune âge qu’il importe de satisfaire par un excellent rationnement alimentaire. Évidemment, cette interprétation est psychologiquement moins facile à admettre car elle interpelle directement l’éleveur et remet en cause les pratiques habituelles.


Quand on voit tous les efforts qui ont été accomplis pour l’amélioration génétique, maillon fort de notre sélection, on ne peut que regretter que l’alimentation demeure le maillon faible en restant inféodée soit à des pratiques empiriques soit à des courants de pensée sans fondement zootechnique.


Catherine Kaeffer


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12/03/2015

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