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Manipulations et développement psychologique du poulain

Énigmatique et changeant, le poulain intrigue par sa proximité avec l’Homme. Il est, dès le premier jour, un compagnon attachant et reconnaissant... pourquoi évolue-t-il ensuite en méfiance, voire en défiance, vis-à-vis de l’Homme ? Comment l’en empêcher ?


A la naissance, le poulain se laisse toucher. Il n’a pas peur de la main qui le manipule. Il recherche même nos bras, notre appui, notre chaleur... si la mère ne s’y oppose pas, nous pouvons même le soulever, le coucher et le relever à notre guise.


Cette apparente soumission n’est qu’immaturité mentale.


Deux semaines plus tard, le poulain évite notre main qui se déplace vivement. Il commence à fuir ou à nous éviter. Le réflexe de menace est là et il le maîtrise enfin.


Le système nerveux du poulain est alors en pleine effervescence à la recherche de son avenir. Il se développe par secteurs, favorisant certains, oubliant d’autres. La croissance ne provoque pas en lui une prise de masse générale du cerveau, seuls sa génétique, l’environnement et l’expérience jouent.


Depuis le cerveau qui ne développe que certains de ses lobes, jusqu’aux nerfs qui se développent dans des zones particulières, le poulain s’adapte à son environnement et à sa vie future.


Il serait alors tentant d’intervenir dans ces instants où l’ensemble du psychologique du futur cheval se joue. L’équilibre du poulain est fragile, il se rompt et se retrouve facilement... trop facilement peut-être.


Il existe à cet âge et pendant toute la durée de croissance cérébrale, une affection nommée « stress toxique précoce ».


Cette affection, comme son nom l’indique, est une application précoce (sur un sujet jeune) de stress soit excessif, soit prolongé. Ce stress, qu’on appellera « émotivité » chez le poulain, va provoquer une réorientation des priorités du cerveau.


Le cerveau développera ce qui sert au poulain pour survivre au stress et le combattre : l’anxiété et l’agressivité. Au détriment de toutes les autres capacités cognitives, comme par exemple, la mémoire ou la réflexion.


L’évolution du cerveau se verra bientôt sur notre jeune poulain. Le changement est souvent perceptible dès la première année de vie. Le cerveau du jeune est alors encore en plein « remaniement ». Le propriétaire a alors un an pour tout changer dans l’évolution cérébrale de son jeune. Ensuite, si le changement ne sera pas impossible, il sera plus délicat et moins définitif.


Pour réussir cette évolution provoquée, il faut comprendre ce qui a déclenché le déséquilibre.


Un poulain stresse dans la liberté et se rassure dans le confinement. Il est en cela l’opposé de ses parents qui se rassurent devant la possibilité de fuir et stressent quand on les en empêche.


Le stress du poulain est très important lorsqu’il doit fuir ou lorsqu’il n’a pas de quoi se cacher. Le poulain se cache dans le troupeau, il s’entoure de ses congénères ou dort dans les hautes herbes. Il stresse quand on le pousse au loin et part alors en cavalcades désorganisées et spectaculaires. Certains voient en ces « coups de folies » de la joie quand il n’y a souvent que de la peur.


Le stress réside dans le mouvement chez le poulain, tout travail en liberté est, par conséquent, strictement déconseillé, jusqu’à ses 2 ans révolus.


Vous remarquerez que les symptômes du stress toxique précoce chez le poulain se révèlent souvent en fin de première année. Cette date n’est pas un hasard. Car le poulain a souvent déjà vécu un stress toxique précoce : le sevrage.


Lors de cette étape, la liberté de mouvement est souvent donnée au poulain, quand on ne le laisse pas seul dans un pré sans cachette ni congénère... le stress est alors au paroxysme et les dégâts importants.


Tout se développe chez le poulain, y compris la mémoire. Mais cette faculté est souvent surestimée par les personnes qui s’occupent de lui. Le poulain apprend vite, très vite. Sa plasticité neurale, (autrement dit, sa capacité à créer ou à détruire des connexions nerveuses) est immense et l’exercice vite appris. Cet apprentissage ne peut avoir lieu que lorsque le poulain est rassuré et calme.


Les exercices en mouvement ne sont donc ni compris, ni appris par le jeune qui est alors trop émotif. Mais le poulain montre de remarquables capacités d’apprentissage pour les exercices statiques ou contenus. Il apprend vite mais mémorise peu.


En effet, devant la modification permanente de son cerveau, tout est éphémère, peu de choses sont stables ou durent dans le temps. De plus, le poulain est par nature relativement impatient et n’aime pas répéter. Les séances courtes ne pourront donc permettre la répétition adéquate à un apprentissage en profondeur. Mais ces exercices, s’ils ne sont pas retenus, vont entretenir l’apaisement du poulain. L’émotif étant moins présent, le poulain plus calme deviendra un cheval adulte plus attentif, plus patient, plus tolérant et plus agréable au quotidien.


Le choix des exercices sera également limité par les capacités cognitives du poulain liées au raisonnement ou à la planification qui ne se développeront que tardivement.


Quand les choses tournent mal et que le poulain devient agressif, on évoque souvent le problème de la « dominance » ou du « respect ». Cette notion est pourtant la dernière que notre poulain apprendra et il ne l’intégrera qu’une fois jeune cheval (entre 3 et 5 ans selon les cas). Les réactions du poulain ne sont donc pas à attribuer à une quelconque recherche de statut social, mais plutôt à un développement cérébral plus ou moins abouti et plus ou moins en faveur des Hommes.


17/07/2014

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