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La fourbure de pâturage : comprendre le rôle des fructanes (suite)

Chronique vétérinaire Dans le précédent numéro, nous avons vu l’importance des teneurs en fructanes de l’herbe dans le déclenchement des fourbures et leurs variations au cours de la journée et de l’année.Mais les conditions de gestion du pâturage sont aussi à considérer : On accuse souvent les prairies trop « riches » de provoquer des fourbures. Certes, un poney rond comme un tonneau est un candidat idéal. Certaines graminées semées accumulent très facilement des fructanes. Par ordre décroissant : ray-grass anglais, fléole des prés, fétuque élevée, dactyle aggloméré, agrostis solonifère, vulpin des prés, pâturin ; brome. Alors vive les prairies naturelles ? Euh... oui et non. Photo 1 sur 1


Question flore, elles contiennent des plantes résistantes à la sécheresse et au froid, championnes de l’accumulation des sucres comme le pissenlit, la folle avoine, le plantain, ou la chicorée. Le plantain est d’ailleurs une plante connue pour être la dernière encore verte en cas de sécheresse... les fructanes sont protecteurs.
Et puis elles sont souvent sans apport de fertilisants. Pas de fertilisation raisonnée égale carences diverses et pousse moins rapide. Or, les légumineuses et graminées carencées en azote et en phosphore accumulent bien plus qu’avec une fertilisation optimale. Bref, on a le sentiment de donner une herbe moins riche alors qu’elle aura un « risque fourbure » plus important.
Vient ensuite la délicate question de la hauteur de l’herbe !
Les chevaux sont aptes à utiliser correctement les pâturages ras. Or, les fructanes sont stockés plus particulièrement à la base des tiges. Donc, plus vous amènerez votre cheval à pâturer ras, plus il aura de chances de consommer des fructanes.
Une technique souvent employée est de faucher la parcelle pour faire le foin et de mettre les poneys dedans ensuite. Deux cas de figure :
- La fauche a été faite sur une herbe épiée. L’épi a consommé les réserves de la plante. Les poneys ne risquent pas grand chose.
- La fauche a été faite au moment où l’herbe commence à ralentir sa croissance et où elle se prépare pour son épi. Beaucoup de fructanes, majoritairement dans la base de la tige : risque non négligeable.
Et pour les foins ?
Lors du fanage, les plantes coupées continuent à respirer et donc à utiliser des glucides : le foin est moins riche en fructanes que l’herbe dont il provient. Un foin fané par beau temps, qui séchera vite aura plus de fructanes que si le temps est couvert. Pour le foin, les fructanes peuvent atteindre 15 à 60 g par kg de MS, l’herbe de première coupe présentant les concentrations les plus élevées surtout si elle n’a pas été laissée aller à l’épiaison.
Les foins d’orge, d’avoine ou de blé sont plus riches en fructanes. Ce sont en effet des plantes capables de stocker toute l’énergie nécessaire à l’élaboration d’un grain important.
Bon, je vous entends soupirer, c’est loin d’être évident tous ces facteurs de variation dans tous les sens... alors je vous propose une stratégie d’alimentation - presque - simple pour un cheval sujet à la fourbure : cheval mince et peu de fructanes.

Au pâturage
Gérer les pâtures en rotation en évitant tout sur-pâturage qui sélectionnerait les espèces les plus efficaces... donc celles qui ont la plus grande facilité à stocker des fructanes.
Préférer une fétuque ou un dactyle à un ray-grass. Contrôler si possible les mauvaises herbes. Ne pas faire pâturer des plantes trop jeunes pour éviter de sélectionner les plus productives.
Préférer un pâturage où l’herbe pousse de façon active. Apporter une fertilisation modérée et raisonnée. Éviter tout pâturage en période froide et ensoleillée ou de sécheresse.
Éviter tout pâturage à moins de 6 cm de hauteur. Gérer au stade 15 cm. Se méfier de l’herbe morte et des plantes trop riches en tiges.
Surtout ne pas mettre le cheval à pâturer juste après la fauche au moment où « il ne reste presque plus rien » car il consommerait le bas des tiges, très riches en fructanes à moins que l’herbe vienne juste d’épier.
Dans les périodes délicates, mettre le cheval au pré la nuit et le rentrer en début ou en milieu de matinée. Vous pouvez aussi le mettre dans un paddock dépourvu d’herbe et lui apporter du fourrage.

Au box
Les chevaux seront nourris principalement au foin. L’utilisation de foin de luzerne est très controversée : moins de fructanes... mais plus d’amidon. Pas forcément génial d’autant que leur teneur en protéines est importante ce qui ne convient pas aux chevaux qui ont de faibles besoins.
Pour limiter la teneur en fructanes d’un foin de pré ou de graminées, faire tremper. En effet, les sucres simples sont solubles dans l’eau froide, les fructanes à plus longue chaîne dans l’eau chaude. Après trois heures de trempage dans l’eau froide, les fructanes diminuent de 20 % environ, le maximum est atteint après 12 heures. Cela ne veut pas dire que la mesure sera suffisante mais comme on dit, elle va dans le bon sens !
Le problème c’est qu’il n’y a pas que les fructanes qui s’en vont dans l’eau... il y a aussi d’autres éléments et en particulier des minéraux. Et évidemment, plus cela dure longtemps, plus cela modifie la qualité nutritive du foin.
La durée préconisée le plus souvent est donc 3 heures dans l’eau froide ou 15 à 30 minutes dans l’eau chaude. Mais pour un cheval très sensible, on peut choisir d’accepter les pertes en matière sèche et de passer à 12 heures de trempage.
Évidemment, il faut ajuster en conséquence les apports en minéraux et éventuellement en protéines de bonne qualité... tout en gardant un apport en énergie très modéré.
 

Catherine Kaeffer
http://techniques-elevage.
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29/05/2013

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