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En hommage à Pierre Lepelley : L’histoire de la souche Olga

  • Pierre Lepelley avec Trompette (© DR)
    Pierre Lepelley avec Trompette (© DR)
Nous venons de voir nos chevaux de complet auréolés d’une médaille d’or. Certes celle que certains appellent la « discipline reine » a plus à voir avec le travail du cavalier et la résistance qu’à la classe… il n’empêche, n’importe quel cheval ne peut participer à ces épreuves. Comme par hasard, pas un « trou » dans son

Nous venons de voir nos chevaux de complet auréolés d’une médaille d’or. Certes celle que certains appellent la « discipline reine » a plus à voir avec le travail du cavalier et la résistance qu’à la classe… il n’empêche, n’importe quel cheval ne peut participer à ces épreuves. Comme par hasard, pas un « trou » dans son papier, et du côté paternel ou du côté maternel, que des souches éprouvées. Le Holstein a numéroté ses familles il y a bien longtemps, Arnaud Evain a commencé à le faire en 1994-1995 mais il s’est arrêté à 2000, certaines ont périclité, d’autres sont apparues, il en est de beaucoup plus remarquables que d’autres.


Pierre Lepelley nous ayant quitté il y a peu, survolons la souche d’Olga en hommage à ce petit bonhomme toujours sous son béret, très grand éleveur puisque réellement créateur de sa souche.


Tout commence chez un copain de la SHR de Canisy : Etienne Noël, propriétaire d’Egoline Cob alezan foncé d’1,60 m facile et travailleuse. Ne prenant pas avec son premier étalon Cob ni avec la « revue » c’est par un demi-sang qu’elle fut saillie la 3e fois. Les Cobs de cette époque (nous sommes en 1953) ne ressemblaient pas beaucoup à ceux que nous voyons aujourd’hui, ils étaient plus dans le sang. Ils étaient également plus recherchés que les demi-sang pour les travaux de la ferme, ce qui fait qu’Un Espoir « queue longue » (qui était parfois le seul critère qui distinguait les Cobs des ½ sang) était encore libre en fin de saison. La hanche un peu haute, l’épaule un peu en avant, les genoux renvoyés sur des canons grêles, les cuisses peu fournies, il montrait quand même de l’étendue, une poitrine profonde, une encolure longue et bien sortie, de la largeur derrière et, tombant bien sur ses quatre pattes il marchait régulièrement. Son père Porte Bonheur « bénéficiait » d’une double paternité, il était par Royal Chesnut qui n’avait pas bonne réputation (chevaux gentils et brillants mais sans fond) ou son fils Ila l’Œil. Il se gratifiait d’avoir engendré la mère d’Ibrahim, Urus et surtout Valet Maître, lui-même père de Narcisse, autre monument du stud-book normand. Mais surtout, la mère d’Un Espoir, Nina Rosa, était par l’Ibrahim de son temps : Vas Y Donc.


Katrine, résultat de ce accouplement fut achetée par le copain de la SHR de Canisy qui venait d’être champion SHR de la Manche avec son Clair de Lune : Pierre Lepelley. Alezane comme ses parents, 1,60 m comme sa mère, avec plus de sang mais surtout beaucoup plus de caractère : jusqu’à 5-6 ans elle ne supportait que son patron pour l’atteler ou lui tenir la tête, très bonne mère par contre. Présentée à 2 et 3 ans dans les concours Cob (alors qu’inscrite ½ sang au stud-book ?) elle fut toujours première comme sa mère. Saillie à 3 ans par un ½ sang elle fit les concours Selle l’année suivante, n’ayant pas tout à fait le même classement à cause de sa tête « un peu forte ». Le demi-sang en question était un certain Juriste, 2e aux achats de Caen mais avec la prime maximum et une origine qui disait quelque chose au cavalier de la SHR de Canisy. C’était un fils d’Ultimate, magnifique pur-sang dont il voyait les bons produits en concours, et de Etense dont la famille gagnait tous les modèles du côté de Sartilly. Un peu plus tard on apprit que son propre frère Konak était un grand gagnant au Portugal, représentant son pays en Coupe des Nations. Pour autant que nous nous en souvenons, c’était un alezan d’1,65-66 m avec beaucoup d’espèce, compact, dans le sang, manquant un peu de quantité dans l’arrière main. S’il ne produisit pas de crack (mais quelques poussifs comme les Ultimate !), il plut aussi beaucoup à Jules Mesnildrey qui en avait quelques-unes comme poulinières dont Venue du Tot, mère du Grand Le Tot de Semilly ! Le résultat fut une pouliche, alezane évidemment, la fameuse Olga… en 1958.


A 3 ans, débourrée et montée par son naisseur, elle fit 50 km aller et retour en 5h (y compris le temps passé à la station !) pour être saillie par un selle de Carentan, ne prit pas mais fit remarquer Galopin VI (petit pur-sang très éclaté fait en plongeant et qui n’a bien produit qu’avec Karvola). L’année suivante quand Pierre Lepelley demanda une carte du dit Galopin, le chef de station lui affirma qu’il était complet, le pourboire de l’année 1961 étant certainement trop maigre ! M. Le Royer aidait à cette époque la SHR de Canisy et il conseilla, à un Pierre Lepelley mécontent, d’utiliser Red Star dont il restait une carte et qui n’était pas loin : St-Lô. Red Star était un magnifique pur-sang d’1,65 m très étendu avec une jolie tête mais un dessus un peu souple. Si son modèle convenait parfaitement aux vues de l’administration, cette administration qui cherchait des chevaux de tenue fit complètement l’impasse sur Red Star. En effet, arrière petit-fils de Pharos, certainement le meilleur de son temps, il était donc de la lignée de Phalaris, grande classe mais sprinter. Son grand-père Link Boy fut un bon miler et son père Magic Red clairement sprinter. Sa mère Olympic Star était également d’origine sprinter, Red Star II gagna deux petites courses à 2 et 3 ans de 1 250 m et 1 100 m. Traditionnellement, les Flyers apportent des belles batues de galop, du mental et une certaine sérénité par opposition aux sprinters. Si Red Star fit de magnifiques prix d’honneur à Fontainebleau et quelques bons gagnants ils n’étaient pas souvent sereins, loin de là !


Mais les poulains d’Olga et de Red Star naquirent chez un certain Pierre Lepelley ! Petit peut-être mais obstiné et adroit. Dès la naissance les poulains étaient licotés, maniés, allaient aux champs le licol attaché aux brancards à côté de leur mère, revenaient de même après avoir été attachés à un piquet entre deux, et à la ferme on prenait et tenait antérieurs et postérieurs. Ça ne casse pas le caractère, ça le forme ! Trompette femelle baie née en 1963 fut donc la première à subir cette éducation jusqu’au débourrage-attelage inclus. Elle fut cédée à André Groualle de la SHR de Canisy et qui avait déjà vu Olga en présentations, elle fut 27e des 4 ans. Sa descendance via Christine Abadie. Gien se retrouve à l’Elevage du Fraigneau chez M. Flogeac. André Groualle débourrait 20 à 30 chevaux par an et, satisfait de Trompette, acheta la suivante : Ardente B. Urfée, le mâle né l’année précédente, borgne, fut vendu à Alexis Pignolet. Ardente, c’était une autre pointure que Trompette, grande baie d’1,67 m très étendue et dans le sang, elle fut bonne gagnante à 4 ans (1 490 F) puis 2e des 5 ans et 2e des 6 ans derrière Alterline montée par Janou Lefebvre ! Elle fut aussi championne de Normandie junior avec Hubert Groualle et avait gagné le Championnat de France jusqu’à son erreur de parcours !


Très routinée et convoitée, Fernand Leredde l’acheta pour « débuter » Xavier. Il fut 2e du Championnat d’Europe junior et faisait 8 pts à 18 ans dans le Grand Prix CSIO de Nice avec elle qui fut 22e des chevaux français (ISO 157-77). Si elle-même ne produisait pas de cracks (peut-être « sucée » par les épreuves, comme le pensait Frederico Tesio) Qualisco Rouge fut quand même un bon cheval (ISO 142) et elle est grand-mère, arrière-grand-mère ou arrière-arrière-grand-mère de grands gagnants tels Duc Rouge II, Imperio Rouge, Olympique Libellule, Qomédie Libellule et sourtout… Myrtille Paulois championne d’Europe 2013 !


La suivante, toujours avec Red Star mais alezane, était l’apothéose du caractère Red Star : difficile et compliquée ! Bagatelle IV fut achetée par Georges Brohier sur son coup de saut, sortit bien à 4 et 5 ans (49e des 5 ans en 1972) et fut une poulinière remarquable : Malicieuse III gagna le derby de Hambourg mais ne fit pas les Jeux pour l’Allemagne à cause de sa peur de l’eau. Nuriel bon étalon après avoir été 5e des 5 ans, 4e des 6 ans derrière Naïka de Baussy et Narcos II 15e du Championnat de France à 7 ans avec Hubert Bourdy puis CSIO avec Hervé Godignon, Psyché est la mère d’Arpège Pierreville tête des 4 ans, 17e des 5 ans, gagnant des étalons de 7 ans et Champion d’Europe Junior avec Julien Epaillard et Sonate celle des Kolysée et Hello Pierreville placé Coupe du Monde et étalon.


L’année 1968 restera dans les mémoires… Olga n’eut pas de poulain mais en 69, année de Serge Gainsbourg, elle eut Diamant, toujours des œuvres de Red Star. Acheté à 6 mois par Georges Brohier qui avait jaugé la famille, il était doté de 3 belles allures et montrait un coup de saut olympique mais aussi un épouvantable caractère ! Son modèle et ses allures permirent à l’administration de l’acquérir et ce fut un très bon étalon national à Annecy, saillissant bien (593 juments en 12 ans mais 232 poulains !).


Eureka naquit l’année suivante et resta à « La Remondière ». Pierre Lepelley avait certes ses idées mais il conversait de bon cœur avec Fernand Leredde qui lui conseillait quelques étalons. Après avoir eu le très bon Idéal Ardent avec Christobal, un Mersebourg, il essaya Uriel que Fernand n’aimait pas beaucoup à cause d’Ascot mais qui avait la cote : Nouvelle Ardente. Par contre c’est Jalisco B, dont il avait la concession qui saillit la fille dont il eut Star Ardente donnant notamment Doline Ardente avec Quouglof Rouge (frère utérin de Papillon et le bon étalon Messire Ardent) puis après sa vente la toute bonne Mélodie Ardente avec Apache d’Adriers. Nouvelle Ardente est également la grand-mère du Champion de France Gracieux Ardent (Quouglof Rouge).


Vide 7 années de suite et Red Star étant enfin mort (le 23 juillet 1974) Fernand Leredde conseilla Grand Veneur en station à Marigny, donc tout près, qui ne travaillait pas beaucoup, donc certainement plus prolifique. D’un modèle plus « selle » que les étalons nationaux habituels il montrait un joli coup de saut. Cet alezan doré d’1,68 m, un peu soulevé et dans le sang, avait une origine problématique : son père Amour du Bois par le mauvais Quirinal mais la toute bonne Margarette LA (sœur de Olympic BL et Nuit d’Amour, têtes de liste des 4 ans comme elle) produisait mal avec les meilleures juments de Sartilly. Sa mère Tanagra par Le Mioche, PS qui n’avait plus la cote (qui faisait des chevaux raides certes mais qui sautaient) avait aussi une très bonne souche : Harpette de la Butte par le très bon Jus de Pomme était archi « Elite Concours Hippique » en tant que mère de 3 très bons gagnants, dont le célébre Veneur D de Marc Houssin (ISO 150 mais en 73 !). Comme beaucoup d’étalons, il travailla bien ses 2 premières années et la prudence normande le mit un peu en pénitence jusqu’à l’apparition de Le Tot de Semilly à 5 ans. Grand Veneur x Juriste, même croisement, Nestor Ardent ne fut peut-être pas Le Tot, encore que… il fut un très grand gagnant international avec Manuel Malta Da Costa.


La dernière « Olga », Polka Ardente était fille de Jouventur grand pur-sang qui avait couru dans le Lyonnais pour J.-F. Pellegrin et que Fernand Leredde avait racheté, n’hésitant pas à prendre des risques pour « aller au sang ». Dragonne Rouge (Thoas du Theillet autre protégé de Fernand) émerge d’un bon lot mais qui bizarrement ne fut pas à la hauteur des filles de Red Star.


La descendance d’Olga fonctionne dans tous les pays d’Europe.


En quelques lignes nous avons survolé la création du « Selle-Français » longtemps meilleur cheval du Monde en CSO. En ce temps l’élevage ne coûtait pas cher : saillies naturelles d’étalons nationaux à bas prix. Les meilleurs -les plus recherchés- étaient à peu près au même prix que les autres, mais pour les avoir il fallait les mériter par les résultats de la poulinière, un peu de chance aidait au tirage au sort. Sortir les poulains était souvent le fait de l’éleveur lui-même et s’ils se faisaient remarquer, un bon cavalier prenait bientôt la relève. Si les primes de concours n’étaient pas très élevées, les primes à l’éleveur augmentaient très vite avec les résultats et incitaient plus à produire du très bon plutôt que du très à la mode pour vendre. Et aujourd’hui la mode est aux chevaux étrangers dont on ne sait souvent pas grand chose…


26/08/2016

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