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Biotine et sabot

On en parle comme de la molécule indispensable à un beau et solide sabot, j’ai nommé : la biotine. Certains ne jurent que par ça, d’autres sont plus sceptiques.


Pour comprendre son action, il faut examiner les processus de synthèse de la corne.


Le sabot est constitué en grande majorité de kératine, une protéine produisant des fibres très solides. Cependant, il est bien beau d’espérer une protéine sans les acides aminés qui la constituent. Or cette protéine est très riche en cystine, un dérivé de la cystéine, un acide aminé soufré. Il faut savoir que sur 20 acides aminés différents, seuls deux possèdent un soufre : cystéine et méthionine. Dans notre synthèse, la méthionine est un précurseur de la cystéine. C’est pour cela qu’on caractérise - notamment - une protéine par sa teneur en méthionine + cystéine.


La méthionine est un acide aminé « indispensable » c’est-à-dire non synthétisé par le cheval. Il doit donc obligatoirement le trouver dans son alimentation. En fait, si le premier acide aminé limitant est la lysine, le second est généralement la méthionine d’où l’importance de la qualité des protéines de la ration. A cet égard, la source de la matière azotée est importante. Les protéines des céréales sont plus riches en méthionine + cystéine (orge, 4,0 % de la MAT, avoine 5,0 % ) que celles apportées par la luzerne (2,8 %) ou le tourteau de soja (2,9 % ). Si on a affaire à un cheval ayant terminé sa croissance, donc pas de problème de couverture des besoins en lysine, il vaut mieux, pour la qualité des sabots, apporter les protéines via les céréales que par l’utilisation de foin de luzerne ou de tourteau de soja. Cependant, ces derniers produits sont indispensables pour les poulinières et les poulains.


Pour synthétiser la kératine, deux oligo-éléments, le cuivre et le zinc jouent un rôle d’adjuvants indispensables. Or pour les deux (mais encore plus pour le cuivre), le risque de carence est élevé et la supplémentation indispensable. Ainsi les besoins en cuivre sont estimés à environ 8 à 9 ppm chez le poulain et à 10 ppm chez l’adulte sachant que la majorité des fourrages français (y compris dans les grandes régions d’élevage) tournent en moyenne à 4 ou 5 ppm (/MS). D’autre part, certains auteurs comme Wolter estiment qu’un taux de 13 ppm reste insuffisant et qu’il faut atteindre 32 ppm chez la jument gestante pour prévenir l’ostéochondrose du poulain. C’est dire si en élevage, sans un apport minéral conséquent, la carence est plus que probable.


Pour avoir une bonne kératine, il faut aussi de la vitamine A. Les risques de carences sont essentiellement en fin d’hiver sachant qu’il y a de moins en moins de carotènes au fur et à mesure que le temps de stockage du foin augmente. L’efficacité de la transformation des carotènes en vitamine A est discutée mais serait suffisante pour les chevaux à besoins moyens à faibles. La supplémentation est conseillée pour les animaux à besoins élevés comme les reproducteurs ou les poulains. A noter que les carotènes ne peuvent pas conduire à une hypervitaminose A alors que des apports de vitamines de synthèse peuvent y aboutir.


Enfin, nous arrivons à l’apport de biotine et à son influence sur la synthèse de la corne.


Avec une ration équilibrée, l’apport de vitamine H (biotine) à une dose proche de 15 mg/j pendant 6 à 10 mois, contribue à améliorer la vitesse de croissance et la dureté des sabots. Les études l’ont montré. Donc il ne sert à rien de faire une cure de 15 jours ou de 1 mois.


D’autre part, ce n’est que si tous les autres éléments précédemment évoqués sont présents en quantité suffisante que l’apport de biotine pourra être efficace. Sinon, c’est un emplâtre sur une jambe de bois. Notez que les fabricants ajoutent souvent dans leurs produits « biotine » du cuivre, du zinc, de la vitamine A ou des acides aminés soufrés. Si votre ration de base est carencée, l’effet observé sera donc parfois en grande partie simplement due à la correction faite à votre insu et non à la biotine sensu stricto. Par contre, si votre ration est bien pourvue, ces apports seront au mieux inutiles.


Une idée largement répandue est que le fait d’administrer de la biotine, entraînerait l’arrêt de sa synthèse par les bactéries du cæcum et donc exposerait le cheval à une carence à l’arrêt du traitement. Or, la biotine est une vitamine hydrosoluble qui serait absorbée dans sa totalité, dès l’intestin grêle donc qui n’a pas d’influence sur les bactéries du gros intestin grandes pourvoyeuses de biotine. En théorie, rien ne laisse présager un changement dans la production bactérienne par un apport massif par l’alimentation. En outre, la biotine est éliminée par voie urinaire et non pas par voie biliaire. Ceci signifie qu’aucune molécule produite par son catabolisme ne peut influencer la production bactérienne endogène de la biotine. Donc à priori pas de risque de carences en biotine suite à l’arrêt d’un traitement.


Parmi les autres facteurs à considérer pour avoir une corne de bonne qualité, les excès de calcium, assez fréquents dans les rations non corrigées avec fourrage exclusif ou s’il y a des apports exagérés de foin de luzerne, en bloquant l’absorption du Cu et du Zn, détériorent la corne. Enfin les supplémentations abusives et répétées en sélénium qui est un antagoniste des composés soufrés, peut perturber la qualité de la corne (maladie alcaline).


18/12/2014

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