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Amélioration génétique : la contribution du GFE

  • Cicave du Talus*GFE (©ER)
    Cicave du Talus*GFE (©ER)
Pourquoi, comment, avec quels étalons et selon quelle méthode le GFE contribue-t-il à l’amélioration génétique de l’élevage, c’est ce que nous allons voir avec à travers cet entretien avec Arnaud Evain. Suite logique du tour d’horizon effectué dans notre précédente édition concernant les techniques de reproduction.





Quelles sont vos actions au service de l’amélioration génétique du cheval de sport ?


Nous avons deux sources d’approvisionnement en étalons pour participer à ce travail :


D’une part, nous suivons sur la scène sportive internationale les étalons performers qui ont sailli quand ils étaient jeunes et dont les premiers produits sont prometteurs. Ils arrivent généralement en fin de carrière sportive entre 14 et 16 ans et nous essayons de les acheter ou de louer leur carrière de reproducteurs afin de les diffuser le plus rapidement et le plus largement possible. Nous expliquons alors aux éleveurs les raisons de nos choix et les qualités que ces étalons transmettent. Nous ne nous intéressons pas aux performers, même très bons, qui n’ont pas sailli étant jeunes car il faut sept à huit ans pour savoir s’ils sont améliorateurs ou pas. Avec cette méthode, nous avons intégré à notre catalogue des vedettes comme Mr Blue, Calvaro, Kannan, Contendro I, Air Jordan et plus récemment Untouchable 27, Vleut, Bisquet Balou ou Conquistador qui ont tous en commun d’avoir des descendants connus et performants au moment où eux-mêmes quittaient la scène sportive.


D’autre part, nous repérons le plus tôt possible les jeunes mâles avec une ou des qualités exceptionnelles et porteuses de progrès potentiels. Nous en faisons une promotion active auprès de nos actionnaires et de nos clients pour qu’ils aient assez de poulains. S’il s’avère qu’ils transmettent leurs « qualités rares », ils prennent toute leur place dans notre catalogue d’étalons confirmés. Ça a été le cas pour Up To You et c’est en train de le devenir pour Candy de Nantuel et Cicave du Talus pour lesquels les échos sont très positifs et dont les premiers produits vont être vus sur les barres cet automne.





Que faites-vous quand vous êtes déçus par la production de ces jeunes étalons ?


Certains étalons ne rencontrent pas l’adhésion des éleveurs : ce fut par exemple le cas pour Un Diamant des Forêts ou encore Consul de la Vie. Leur valeur sportive était devenue très supérieure à leur intérêt pour les éleveurs et nous les avons donc vendus. Le premier tourne en CSI 4 et 5* au Canada et aux USA et le second fait le bonheur d’une jeune cavalière au niveau 145. Cela se fait parfois avec un bénéfice, mais le plus souvent c’est à perte et cela pèse sur le prix de revient de ceux que nous conservons.


Pour les chevaux que nous estimons beaucoup, il y a également la possibilité de louer leur carrière sportive, comme nous l’avons fait avec Amant du Château, en conservant leur carrière de reproducteurs ou de les exporter pour les changer de harem comme nous venons de le faire avec Pezetas du Rouet.


Nous essayons de garder les meilleurs et de réinvestir continuellement dans des jeunes chevaux de 2 à 5 ans. Nous appliquons ce programme depuis le démarrage du GFE et nous l’avons étendu à l’achat de foals depuis 2018.





Quels sont vos critères de choix pour la jeune génétique ?


Nous ne nous intéressons pas forcément aux premiers des concours d’élevage ; pour nous un candidat étalon doit avoir un pedigree intéressant et pas de gros défauts de conformation ou de locomotion, mais il doit avoir avant tout une ou deux qualités très fortes, susceptibles d’en faire des améliorateurs !


Dans un premier temps, nous vérifions que ces qualités leur sont utiles pour faire d’eux de très bons performers : la souplesse et l’élasticité de Candy De Nantuel, la qualité de galop de Cicave du Talus, l’élasticité et le respect d’Up To You, la force et le tempérament d’Excalibur de la Tour Vidal…


Dans un deuxième temps, nous essayons d’évaluer s’ils transmettent ces qualités à leurs descendants avant de leur accorder une place dans le groupe de nos étalons Elite.


Pour résumer, avant d’acheter un étalon nous demandons aux membres de notre comité de sélection s’ils pensent que le candidat a des qualités fortes et intéressantes qui lui permettent de prétendre à évoluer au minimum au niveau 150 et plus et s’ils sont personnellement prêts à lui confier une de leurs propres juments durant leur période de testage.


Nous n’allons plus loin que si les réponses à ces deux questions sont positives.





Pourquoi l’achat du « top price » des Ventes Fences au pedigree plutôt modeste ?


Vous parlez de Gwenndu de Kergane ? c’est une excellente illustration de ce que je viens de dire car il remplit parfaitement les deux conditions que je vous ai exposées : une qualité exceptionnelle d’explosivité et d’élasticité qui lui permet de prétendre évoluer un jour à très haut niveau et un pedigree plein de courants de sang rares qui donne envie de le tester.


Nous cherchons systématiquement les meilleurs, mais nous ne voulons pas nous cantonner aux seuls sangs de Diamant de Semilly, Kannan, Clinton, Baloubet, Contender, Heartbreaker et autres Casall.


Avec un père qui n’a sailli qu’un an avant d’être exporté comme cheval de sport aux USA et castré et avec une souche maternelle pleine de très bons gagnants avec des courants de sang très peu utilisés comme Grand Chef Bleus et Gold de Bécourt, il présente une originalité et une rareté génétique qui feront sa force dans quelques années : s’il confirme sa valeur sportive, il sera très facile à croiser avec la plupart des pedigrees actuels.


C’est un clin d’œil à l’histoire car il a un profil génétique atypique qui rappelle parfaitement celui de notre premier achat : Mr Blue, lui aussi né d’un père quasi inconnu exporté en Indonésie et d’une lignée peu utilisée dont il est devenu le premier grand champion !


Votre sentiment sur la conjoncture actuelle pour l’élevage de chevaux de sport : plutôt optimiste ou plutôt pessimiste ?


De toutes façons plutôt optimiste par nature et prudent par expérience !


L’activité commerciale durant la dernière Grande Semaine de l’Elevage et le succès des six soirées des ventes Fences nourrissent le sentiment que le marché des jeunes chevaux de qualité connaît un réel rebond. Les succès récents du Selle Français sur la scène internationale font que notre élevage national devrait profiter de ce regain d’intérêt.


Nous devons faire des efforts pour réduire les coûts du cycle d’élevage et de la formation des jeunes chevaux et nous organiser pour faciliter tous les modes de commercialisation de la production à un stade précoce pour les éleveurs qui le souhaitent. Les modifications des calendriers des concours d’élevage vont dans ce sens et la SHF doit chercher à se rapprocher au plus près des cavaliers de jeunes chevaux pour leur proposer un programme de formation toujours moins couteux et plus efficace.


Si nous y parvenons, nous sortirons du tunnel dans lequel nous sommes entrés il y a bientôt dix ans.





Et pour le GFE, comment ça va ?


Nous avons plutôt bien traversé cette période grâce à des choix génétiques qui se sont avérés pertinents et à un effort d’internationalisation très important.


Nous devons continuer d’être attentifs à toutes les évolutions et nous sommes conscients de la nécessité de continuer à investir dans la jeune génétique pour être en capacité d’offrir le meilleur à nos actionnaires et à nos clients.


Recueilli par ER


24/10/2019

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